Le Blog Argentique

Si vous aviez encore des doutes, oui, développer ses propres pellicules à la maison est tout à fait possible. Néanmoins, attention aux non-initiés, puisque, comme nous en parlions dans d’autres articles, le développement d’une pellicule noir et blanc est très facile et ne demande que très peu de compétences.

Mais aujourd’hui nous allons développer une pellicule couleur, ce qui est un petit peu plus complexe. Rien d’insurmontable évidemment, mais si vous avez déjà fait quelques développements noir et blanc par le passé, ça va grandement vous faciliter la tâche. En effet, la base du processus est très similaire, mais les étapes sont un peu plus longues et complexes.

Le nécessaire

Comme le procédé de développement C-41 partage la même base que le procédé noir et blanc, tout le matériel utilisé pour développer des pellicules noir et blanc va nous resservir ici. Néanmoins, ici on va avoir besoin, en plus de cela, de matériel pour maintenir au chaud la pellicule et nos produits chimiques, et ce à une température très précise. Voici donc la liste de tout le nécessaire.

Les produits chimiques

L’élément principal ici ce sont les chimies pour développement C-41. Contrairement aux chimies noir et blanc, en C-41 c’est assez compliqué de se procurer chaque produit séparément pour plein de raisons chimiques compliquées à expliquer. Pour faire simple, à part si vous avez plusieurs centaines de pellicules à développer dans le mois, vous trouverez tout le nécessaire dans des kits de développement contenant tous les produits chimiques à utiliser.

De nombreuses marques en fabriquent, les plus connues étant Tetenal, Rollei, et Cinestill. Sachez que, contrairement au développement noir et blanc où les chimies utilisées ont un impact sur les photographies, en couleur elles n’ont quasiment aucune influence. Le choix du kit n’a donc pas une importance capitale.

La seule différence réside dans l’utilisation des produits puisque le développement C-41 se fait normalement à 38°C, mais certains kits sont utilisables à d’autres températures, comme à 30°C voire même à 25°C. Ca rend le développement un peu plus simple, puisque la température est plus facile à atteindre et à maintenir.

Le développement

Etape 1 – Mettre la pellicule dans la cuve

Dans cette première étape, nous allons récupérer le contenu de la pellicule pour la mettre sur une spire, afin qu’elle soit à l’abri de la lumière dans notre cuve de développement.

Etant donné que c’est exactement la même manipulation que pour une pellicule noir et blanc, j’invite ceux qui ne savent pas déjà mettre une pellicule en spire, puis en cuve, à aller voir l’article ci-dessous pour plus d’informations.

Etape 2 – Préparer les chimies

Comme pour tout développement argentique, les produits utilisés ici sont dangereux pour l’environnement. Lorsqu’il ne sont plus utilisables, stockez-les dans des bouteilles, ou des bidons, avant de les confier à votre déchetterie. Pour rappel, l’accès à la déchetterie dont dépends votre lieu de résidence est gratuit pour les particuliers en France comme en Belgique.

En développement C-41 on dispose généralement de 6 produits chimiques, qu’on va devoir mélanger pour obtenir 3 ou 4, préparations différentes. Pour préparer les produits rien de plus simple, il suffit de suivre le petit manuel fourni par le fabriquant du kit de développement.

Attention, suivant les kits, les proportions peuvent varier. Voici ci-dessous le manuel du kit que j’utilise dans cet article. Avis aux non-anglophones, la plupart des indications des kits de développement sont uniquement en anglais, mais l’application mobile Google Traduction sait traduire le contenu d’une photo.

Ce guide nous apprends qu’on va devoir préparer 3 produits : un révélateur couleur ; un blanchisseur-fixateur (qu’on appelle souvent “Blix”) ; et un stabilisateur. Avec certains Kits vous pouvez avoir un 4e produit, c’est simplement que votre kit sépare le blanchisseur du fixateur à la place d’utiliser un produit 2 en 1. Le processus est un peu plus long qu’avec un kit qui utilise un produit qui combine les deux, mais en contrepartie, les produits se conservent un peu mieux.

Pour prendre l’exemple qu’on a ici, pour créer un développeur couleur, on nous demande d’utiliser les 3 bouteilles de développeur couleur A, B, et C. Attention néanmoins, ici ce kit précise de toujours commencer par ajouter l’eau, puis de mettre la bouteilles A avant la bouteille B.

Ensuite c’est exactement comme pour le développement noir et blanc, il suffit de mesurer les quantités avec des éprouvettes graduées. On commence par verser dans une bouteille propre 800mL d’eau, puis 100mL de Part A, 50mL de Part -B, et enfin 50mL de Part -C. Petit conseil, pensez à écrire les noms sur les bouteilles, ça évite les erreurs bêtes.

Avis aux maladroits : le blix, tache très facilement, faites attention à vos affaires.

Conseils de conservation

Comme tous les produits de développement argentique, les produits qu’on utilise ici s’abîment très rapidement quand ils sont préparés. Essayez autant de possible de n’utiliser que la quantité nécessaire, quitte à diviser les quantités données par le manuel pour ne pas tout préparer d’un seul coup.

De plus, si vous souhaitez conserver vos préparations le plus longtemps possible, il faut éviter que le produit ne soit en contact avec de l’oxygène. Il est vivement conseillé de stocker les produits dans des bouteilles accordéon qui permettent de chasser l’air des bouteilles, ou encore d’utiliser des bombes de spray antioxydant, qui remplacent l’oxygène par un gaz inerte.

Etape 3 – Préchauffage

Maintenant que la pellicule et nos produits sont prêts, il est temps de mettre l’ensemble à la bonne température.

Ici, je vais faire un développement à 38°C puisque c’est la température qui fonctionne avec tous les kits C-41. Mais certains kits permettent de le faire à d’autres températures, auquel cas, pensez à bien suivre les durées mentionnées dans le manuel pour la température voulue.

La première mission est donc de préchauffer les différents produits, ainsi que la pellicule, pour que tout le monde atteigne la bonne température. Pour cela, nous allons faire un bain-marie. Prenez un thermomètre, et préparez une bassine d’eau chaude légèrement plus chaude que la température voulue comme la température va redescendre rapidement.

Préchauffer tous les éléments

Ajoutez dans la bassine votre cuve de développement. Attention, elle est vide, elle va avoir tendance à se renverser, fermez là pour éviter d’avoir à la tenir, ou calez là comme il faut.

Placez également dans la bassine vos produits chimiques, à l’exception du stabilisateur qui, quant à lui, s’utilise à température ambiante.

Maintenir le tout à la bonne température

La bassine va alors rapidement descendre en température. Votre rôle à partir de maintenant va être de maintenir votre bassine à précisément 38°C tout au long du processus, en contrôlant cela avec un thermomètre d’aquarium. Dans mon cas, le manuel du kit de développement que j’utilise indique que j’ai une marge d’erreur de seulement +-0.3°C, il faut donc être très précis.

Pour garder le tout à température, il existe 2 solutions :

• Vous pouvez investir dans un thermostat à immersion qui va s’occuper de maintenir la température pour vous, c’est une solution assez chère, mais très pratique.
• Ou alors, vous pouvez simplement rajouter de l’eau chaude quand la température redescend. Certains font ça dans leur baignoire, mais on peut aussi préparer 2 bouteilles d’eau bien chaude (~50 à 60°C) et en rajouter dès que c’est nécessaire.

Dans tous les cas, après 5 minutes à maintenir l’ensemble à 38°C, vérifiez que vos produits sont bien à température en y glissant le thermomètre. Et si c’est le cas, il est temps de passer à la suite.

Etape 4 – Le développement

Il est temps de développer notre pellicule à proprement dit. Comme je le disais plus tôt, toutes les durées et les températures à respecter sont mentionnées dans votre manuel d’utilisation. Comme ici je développe à 38°C, je regarde ce que m’indique le tableau correspondant pour avoir toutes les températures et les durées à respecter.

Le révélateur couleur

C’est la phase la plus critique du développement puisqu’ici la température doit être vraiment très précise. Dans mon cas, le manuel me dit que cette étape doit durer 3min15, et je dois rester à +-0.3°C de 38°C. Autrement dit, il faut rester entre 37.7 et 38.3°C. Surveillez donc bien la température tout au long de cette étape.

Versez le révélateur couleur dans la cuve, et lancez votre chronomètre.

En plus de surveiller la température durant toute la révélation, vous devez remuer la cuve continuellement. Pour cela, vous pouvez fermer votre cuve et la faire rouler tranquillement dans la bassine, ou alors utiliser un l’agitateur si votre cuve en a un. Et oui, contrairement au développement noir et blanc, en couleur, les produits doivent être constamment agités pour donner un résultat uniforme.

Une fois le temps écoulé, retirez le révélateur de la cuve, et on peut passer à l’étape suivante. Toujours pareil, la cuve est vide, donc elle va vouloir se balader dans la bassine, ne la lâchez pas.

Le blix (blanchiment-fixage)

Toutes mes félicitations, vous avez passé l’étape la plus compliquée. A partir de maintenant, nous aurons beaucoup plus de marge d’erreur sur la température. Ici mon guide d’utilisation indique que j’ai le droit à une marge de +-2°C, et que cette étape dure 6 minutes.

Comme pour le révélateur couleur, on verse le produit dans la cuve (attention, je rappelle que le blix tâche), puis on lance le chronomètre. Et comme pour le précédent bain, on reste vigilant sur la température et on mélange tranquillement.

Une fois le temps écoulé, retirez le blix de la cuve, et on passe à la suite !

Rinçage

Enfin, le rinçage c’est l’étape la plus tranquille de toute. Ici inutile de trop s’attarder sur la température, il faut simplement ne pas faire de choc thermique. On va profiter de l’eau encore chaude du bain-marie pour rincer la pellicule.

Notre rôle ici va être de rincer la pellicule des résidus de produits chimiques. On remplit la cuve avec l’eau du bain-marie, puis on mélange tranquillement pendant 1 minute, et on vide dans un autre récipient pour ne pas réutiliser cette eau. Répétez l’opération au moins 4 fois.

Lors du dernier rinçage, on va en profiter pour faire redescendre tranquillement la cuve en température pour pouvoir utiliser notre stabilisateur. Pour cela, remplissez à moitié la cuve avec de l’eau de la bassine et versez petit à petit de l’eau à température ambiante.

Stabilisation

Votre pellicule n’est maintenant plus sensible à la lumière, et elle ne contient plus de produits chimiques, on peut donc maintenant ouvrir la cuve sans risque. Ne la sortez pas encore, il nous reste une dernière étape à effectuer.

Maintenant qu’on est revenu à la bonne température, il ne reste plus qu’à verser notre stabilisateur dans la cuve. Ce produit mousse très facilement, donc versez-le doucement, moins il y en a mieux c’est. Enfin mélangez tranquillement durant une minute.

Vous pouvez maintenant retirer le stabilisateur de la cuve.

Etape 6 – Découvrir ses photographies

Ca y est, votre pellicule est maintenant développée, vous pouvez enfin la récupérer pour découvrir le résultat ! 🥳

Normalement si le développement est fait correctement, les inscriptions sur le bord de votre pellicule doivent être parfaitement nettes et bien noires.

Vous pouvez maintenant mettre votre pellicule à sécher, grâce à une paire de pinces de séchage. Si vous n’en avez pas, vous pouvez aussi attacher le haut de la pellicule avec des pinces à linge, puis y ajouter un maximum de pinces à linge en bas pour faire un poids. Plus c’est lourd, plus elle sera bien droite et plate.

Essorez là en la passant entre 2 doigts, ou en utilisant une pince d’essorage. Puis après quelques heures elle sera entièrement sèche. Vous pourrez alors la découper pour en faire des bandes de négatifs afin de scanner vos photographies, ou même de les tirer sur papier grâce à un agrandisseur si ça vous chante !