Développer ses propres pellicules argentiques est parfaitement faisable à la maison. Comme nous l’avons vu dans l’article « Quel procédé utiliser pour développer ses pellicules ? », développer des pellicules noir et blanc peut être fait à la maison très facilement.
C’est une pratique très accessible qui demande peu de matériel, et aucune compétence particulière. N’importe qui peut donc assez facilement développer ses propres pellicules noir et blanc à la maison. Et ça, c’est top quand on veut faire des économies, ou simplement quand on n’a pas un laboratoire argentique à proximité.
Le matériel
Du côté du matériel vous allez avoir besoin d’un petit peu de matériel. Vous pouvez trouver des Kits complets comme celui ci-dessous qui vous permettent d’avoir absolument tout le nécessaire pour développer vos pellicules.
Pour ceux qui n’ont pas envie de se compliquer la vie, il existe des kits qui permettent d’obtenir tout le nécessaire pour commencer à développer ses pellicules noir et blanc à la maison. Ils sont généralement fournis avec un lot de produit chimiques qui permettent de développer 1 ou 2 pellicule, qu’il faut ensuite remplacer.
Néanmoins, pour ceux qui veulent faire des économies, ou pour ceux qui veulent bien choisir leur matériel, il est toujours mieux d’acheter le nécessaire séparément. D’autant que, à quelques exceptions prêts, une bonne partie des éléments qui sont fournis dans ces kits peuvent être remplacés par des objets que tu peux trouver dans tes placards.
- Une cuve de développement : c’est l’un des seuls éléments indispensables que tu vas devoir acheter. Il existes des cuves Paterson et Jobo qui sont très similaires.
Tu pourras en trouver qui permettent de développer 1 ou 2 pellicules à la fois, elles sont parfaites pour une utilisation personnelle. Vérifie simplement qu’elle est fournie avec sa ou ses spires, qui peuvent parfois être vendues séparément. - Un extracteur de film ou un décapsuleur pour récupérer le film qui se trouve dans la pellicule. On peut ouvrir une pellicule complètement avec un décapsuleur de bouteille, mais il casse entièrement la pellicule, ce qui oblige à le faire dans le noir complet pour ne pas exposer le film. Alors qu’un extracteur permet de récupérer le bout du film à la lumière du jour, il ne reste plus qu’à tirer dessus dans le noir ce qui facilite la manipulation.
- Une paire de pinces lestées ou des pinces à linge, elles permettent aux pellicules de sécher bien à plat en y mettant un poids pendant le séchage. On peut aussi le faire avec des pinces à linge, mais c’est nettement moins efficace, et ça peut faire courber le film, ce qui le rend très difficiles à numériser ou à tirer sur papier.
- Une paire de ciseaux pour découper le film
- Des bidons accordéons ou des bouteilles vides pour stocker les différents produits chimiques. Les bidons accordéons ont le grand avantage de conserver les chimies à l’abri de la lumière, et de permettre de retirer tout l’air pour éviter que les produits ne s’oxydent. On peut donc les conserver plus longtemps qu’avec des bouteilles classiques.
- Un thermomètre à immersion car on a besoin de connaître la température des produits chimiques. Un petit thermomètre d’aquarium suffit pour le développement noir et blanc. Dans le cas des développement couleurs ou des inversibles, il est quand même mieux de privilégier un thermomètre de laboratoire plus précis.
- Une balance ou des éprouvettes graduées. Si vous utilisez des chimies prêtes à l’emploi, inutile de s’en procurer. Mais il est quand même nettement moins cher d’utiliser des produits à préparer. Si tu en choisis des en poudre, il te faudra une balance pour pouvoir les peser, et si tu en choisis des liquides, il te faudra des éprouvettes graduées.
- Un étendoir à linge ou un fil de fer, pour avoir un coin où faire sécher les films développés. Une cabine de douche peut aussi être une bonne alternative. Le principal étant de prévoir un coin qui n’est pas dans le passage, ni un courant d’air, et avec le moins de poussière possible.
Des produits chimiques
En noir et blanc, nous avons besoin de 3 à 4 produits. Il nous faut un révélateur, d’un bain d’arrêt, d’un fixateur et, optionnellement, d’un agent mouillant. Tous ces produits peuvent être achetés ensemble dans un kit de chimies pour développement noir et blanc, mais les acheter séparément permet de faire plus d’économies (à condition de faire au moins une bonne dizaine de pellicules dans l’année).
Si vous souhaitez vraiment limiter les coûts, il est bon de noter que le bain d’arrêt peut être remplacé par de l’eau vinaigrée, et l’agent mouillant par du liquide vaisselle.
Le développement
Etape 1 – Se plonger dans le noir
Le premier point à effectuer, pour pouvoir développer ses photographies, est de sortir le contenu de la pellicule pour le mettre dans la cuve. Pour cela, nous aurons besoin d’être dans le noir complet. Comme votre pellicule est pour l’instant sensible à la lumière, il ne faut surtout pas l’exposer, sans ça, vous pouvez dire adieu à toutes vos photographies. Il faut donc se plonger dans le noir absolu, aucune source de lumière ne doit être présente.
Si ce n’est pas possible d’être dans le noir complet, il existe des manchons de chargement, il suffit de placer tout ce dont vous avez besoin dans le manchon. Une fois fermé, celui-ci est étanche à la lumière. Vous pourrez donc faire les manipulations même si vous êtes dans une pièce lumineuse.
Etape 2 – Récupérer le film
Avec un extracteur de film
Si vous utilisez un extracteur de film plutôt qu’un décapsuleur, vous pouvez récupérer le tout début de la pellicule à la lumière du jour grâce à celui-ci. Tant que vous ne tirez pas plus de 10cm de pellicule, vous n’aurez aucun soucis.
Grâce à cet outil, vous pouvez faire cette étape sans être dans le noir complet. Ca permet de grandement se faciliter la vie. J’ai même même déjà fait un tutoriel à ce sujet :
Avec un décapsuleur
Attention, avec un décapsuleur nous allons devoir ouvrir la pellicule entièrement. Les illustrations sont faites à la lumière à titre d’exemple, mais la manipulation doit se faire dans le noir complet pour ne pas détruire les images présentes sur la pellicule.
Si vous utilisez un décapsuleur, vous allez devoir ouvrir la pellicule entièrement. Munissez-vous de votre décapsuleur, et pliez l’un des côtés de la pellicule, il va alors se désolidariser.
Vous avez maintenant accès à votre film, prenez-le délicatement. Surtout laissez-le bien enroulé pour le moment, il est bien plus facile à manipuler ainsi. Sachez qu’à vue de nez, vous pouvez mettre vos doigts tout gras sur les 10 premiers centimètres de la pellicule sans soucis. C’est la partie perdue qui sert uniquement à la mise en place dans l’appareil. Si vous les mettez plus loin, pas de panique, mais essayez juste de toucher les bords plutôt que le centre pour éviter de l’abîmer ou d’y laisser des traces.
Découper l’amorce
Si vous avez utilisé un décapsuleur précédemment, faites bien attention de ne pas vous couper puisque vous allez devoir utiliser vos ciseaux dans le noir complet.
On va venir découper l’amorce de la pellicule avec notre paire de ciseaux. L’amorce est le tout début du film. Elle comporte une petite encoche qui peut grandement nous embêter par la suite, on va donc la retirer. Découpez également les coins maintenant formés de part et d’autre de la pellicule.
Cette forme lui permet d’être bien plus facile à mettre dans la spire dont nous allons parler juste après.
Etape 3 – La mise en spire
Nous allons placer notre pellicule sur la spire, cette étape doit se faire dans le noir complet.
Enrouler le film sur la spire
Maintenant, il est temps de mettre le film sur une spire pour pouvoir l’insérer dans la cuve. C’est souvent la partie la plus complexe pour les débutants. Prenez votre temps et ne paniquez pas. Vous finirez par réussir même si ça vous demande plusieurs essais.
Sur une spire, il existe deux petites marques qui représentent l’endroit où faire entrer le bout de la pellicule. Placez le début de votre film sous ces deux marques et insérez là-dedans. A ce moment, deux billes vont la bloquer légèrement. Vous devez tirer sur votre film pour lui faire passer les billes, qui vont la maintenir en place.
Le bout du film est maintenant en place. A ce moment, il ne reste plus qu’à faire des va-et-vient avec le côté de la spire pour faire rentrer la pellicule en entier. Il faut un peu de patience, ça peut être un petit peu compliqué les premières fois.
Tips de pro: gardez tout le temps un doigt sur les marques qui dessinent l’entrée de la spire, cela évite que la pellicule ne se mette de travers et ne se bloque à l’entrée de celle-ci. Si c’est complètement bloqué, ouvrez la spire en tournant assez fort l’un des côté et recommencez tranquillement.
Une fois que la pellicule est entièrement enroulée sur la spire, il ne reste plus qu’à découper avec les ciseaux le bout du film encore attaché à l’axe de la pellicule, et toutes mes félicitations, vous avez passé l’étape la plus compliquée !
Mettre la spire dans la cuve
Enfin, il faut placer la spire sur le tube prévu à cet effet, et placer le tout dans la cuve avant de refermer l’ensemble avec la sorte d’entonnoir de votre cuve. C’est lui qui va couper la pellicule de toute lumière extérieure. Vérifiez bien que l’entonnoir est correctement refermé, s’il a fait clic en le tournant et que vous ne pouvez pas le sortir de sa place tout est bon. A partir de là, vous pouvez rallumer la lumière, ça y est, vos photos sont à l’abri dans la cuve !
Maintenant que la pellicule est à l’abri dans la cuve, l’ensemble des étapes suivantes peuvent être effectuées à la lumière.
Etape 4 – Préparer les chimies
C’est le moment qui fait peur. On parle de choses inconnues et compliquées et pourtant c’est plutôt simple en fait, il suffit de suivre les instructions ! Les produits chimiques que vous allez utiliser sont soit, déjà tout prêts, soit à diluer. Dans tous les cas, il va falloir préparer la bonne quantité de chaque produit pour votre pellicule.
Prenez 3 bouteilles vides pour préparer vos produits. Dans la première, nous allons mettre le révélateur, dans la seconde le bain d’arrêt, et dans la dernière le fixateur. Pensez à noter sur chaque bouteille les noms de chacun pour éviter les erreurs, il ne faut surtout pas inverser les produits.
Quelle quantité préparer ?
La quantité de produit à préparer dépend de la taille de la cuve que vous utilisez. Dans mon cas, il est écrit en dessous de cette dernière les quantités devant être préparées pour chaque format de pellicule. Ma cuve m’indique, par exemple, d’utiliser 290mL de préparation pour une pellicule 35mm. Je dois donc préparer au moins 290mL de chaque produit. Et général on prévoit quand même une petite marge, j’arrondis donc à 300mL par sécurité.
Les dilutions
Si vous utilisez des chimies à diluer, les instructions pour préparer vos produits sont, en général, écrites sur les emballages de chacun d’entre eux. Elles sont aussi disponibles en version plus détaillées sur le site du fabricant. Cependant, désolé aux non-anglophones, les versions numériques sont souvent uniquement disponibles en anglais.
Les dilutions sont notées sous la forme 1+[un nombre]. Par exemple, un produit devant être dilué à 1+4, veut dire que pour 1 volume de produit on ajoute 4 volumes d’eau. Pour 300mL ça ferait donc 60mL de produit pour 240mL d’eau.
Le cas du bain d’arrêt au vinaigre
Si vous utilisez du vinaigre pour faire votre bain d’arrêt. Diluez simplement du vinaigre blanc dans de l’eau. 10 à 20% de vinaigre doivent largement suffire pour une voire même plusieurs pellicules. Certaines personnes font même des bains d’arrêt en utilisant uniquement de l’eau, ça peut être suffisant si vous ne réutilisez pas votre fixateur et que vous ne traînez pas entre les étapes de révélation et de fixation.
Etape 5 – Révélation, bain d’arrêt, fixation
Il est temps de passer la pellicule dans les 3 produits que nous venons de préparer. C’est ainsi qu’on va venir transformer notre pellicule argentique en négatif, insensible à la lumière.
Pour cette étape, munissez-vous d’un chronomètre. Il est nécessaire de mesurer le temps d’action de chaque produit.
N’ouvrez jamais votre cuve avant d’avoir terminé de passer la pellicule dans les 3 produits.
Ne jetez jamais aucun des produits utilisés lors du développement de vos pellicules dans les canalisations ou dans la nature, récupérez-les dans un bidon ou dans une bouteille et confiez les à votre déchetterie locale. A noter que le bain d’arrêt doit être stocké à part pour éviter la création de gaz en le mélangeant aux autres produits.
La révélation
Le premier produit à utiliser est le révélateur. Comme son nom l’indique plutôt bien, il permet de révéler l’image présente sur votre pellicule.
Avant d’utiliser votre révélateur, il faut connaître le temps de révélation nécessaire. En noir et blanc, il est unique à chaque modèle de pellicule et varie en fonction du révélateur utilisé. Cette durée est souvent inscrite dans le carton de la pellicule, ou sur l’emballage du révélateur. Mais vous pouvez aussi retrouver cette information sur le site du fabricant de la pellicule, ou sur des sites répertoriant ces informations comme Pirate Photo.
Vous pouvez maintenant verser votre révélateur dans la cuve, puis la fermer avec son chapeau. Vous allez devoir remuer le produit dans la cuve selon les consignes données par son fabricant. La plupart du temps on mélange le produit en retournant la cuve gentiment durant les 10 premières secondes, puis durant 10s à chaque minute écoulée. Après chaque période où on mélange la cuve, tapez le dessous de la cuve contre une table d’un coup sec pour chasser les bulles d’air.
Une fois la durée écoulée, vous pouvez vider votre cuve.
Le bain d’arrêt
Versez sans trainer le bain d’arrêt dans votre cuve et mélangez durant quelques secondes. L’acidité du bain d’arrêt va permettre de stopper l’action du révélateur sur la pellicule. Contrairement à l’étape de révélation, ici la durée est beaucoup moins importante. Que vous laissiez le bain d’arrêt 2 ou 5 minutes n’aura pas de réel impact sur la pellicule. L’idée est simplement de bien la rincer pour laisser place au fixateur.
Pour cela, mélangez votre cuve pour retirer au maximum les résidus de révélateur. Puis, après avoir laissé agir pendant, à minima, une minute, vous pouvez passer à la suite dès que vous êtes prêts.
La fixation
Le fixateur, est le dernier produit que nous allons utiliser. Il sert à fixer l’image présente sur la pellicule et faire en sorte qu’elle ne soit plus sensible à la lumière. Elle va venir retirer de la pellicule toutes les particules d’argent qui n’ont pas réagi.
Comme pour le bain d’arrêt, ici, la durée est beaucoup moins importante qu’avec le révélateur. Les fabricants donnent d’ailleurs souvent une fourchette très large. Laissez-le agir quelques minutes, en suivant les recommandations données. C’est généralement entre 2 et 5 minutes. Ici aussi il est nécessaire de mélanger le produit quelques secondes toutes les minutes et de taper la cuve pour chasser les bulles d’air afin que le produit agisse uniformément.
Une fois la durée écoulée, vous pouvez vider votre cuve.
Etape 6 – Rinçage
Ça y est, vous avez réussi, votre pellicule n’est plus sensible à la lumière ! Vous pouvez maintenant ouvrir votre cuve. Avant de mettre vos doigts dedans, remplissez votre cuve d’eau et mélanger tranquillement de temps en temps pour rincer votre pellicule. Continuez à la rincer pendant 5 bonnes minutes en remplaçant l’eau 3 voire 4 fois.
Lors du dernier remplissage, ajouter dans votre eau une petite goutte d’agent mouillant ou, à défaut, de liquide vaisselle. Cela va permettre d’éviter d’avoir des traces de calcaire sur votre pellicule. Mais n’en mettez pas trop, ou cela aura l’effet inverse en laissant des résidus de produit au séchage.
Etape 7 – Séchage
Votre pellicule est maintenant prête, vous pouvez la récupérer. Cependant, attention, elle est encore très fragile, ne mettez pas vos doigts sur les photos.
Accrochez-la à la verticale, et laissez-la sécher pendant bien 2h. Mettez-y un poids au bas pour qu’elle reste bien droite. Il existe des pinces de séchages idéales pour cela, mais autrement, des pinces à linge peuvent tout de même convenir en dépannage.
Une fois bien sèche, vos photographies sont prêtes ! On découpe généralement le film par bandes de 4 ou 6 photographies pour faciliter le stockage. Enfin, vous pourrez les scanner vous-même, ou en faisant appel à un professionnel ! Vous pouvez même les tirer, ou les faire tirer, si vous souhaitez obtenir une version papier de vos photos !
Que faire des déchets ?
Evidemment au bout d’un moment, à force d’utiliser des produits pas toujours très bons pour l’environnement, se pose la question de la gestion des déchets. Tous les éléments utilisés pour développer vos pellicules doivent être retraités correctement pour en limiter l’impact.
C’est valable pour le révélateur et le fixateur au minimum, mais c’est aussi valable pour le bain d’arrêt, et même les eaux de rinçage. Certains considèrent que ces deux derniers éléments sont suffisamment dilués pour ne pas avoir un impact plus conséquent que les détergents ménagé. Mais rappelez-vous que si chacun pense ainsi, ça fait énormément de produits dans la nature, récupérez donc autant que possible, d’autant qu’en France le retraitement de ces produits est gratuit pour les particuliers 😊
Vous devez simplement emmener vos déchets dans une déchetterie qui propose la collecte de produits chimiques. Pour éviter tout accident, indiquez sur le contenant la nature du produit donné (révélateur argentique, fixateur argentique, etc…). Voici un lien qui vous permettra de trouver la déchetterie la plus proche de chez vous : où déposer vos déchets chimiques ?
Et voilà !
Vous savez maintenant développer vos pellicules, c’était pas si compliqué non ? Pour ceux qui souhaitent encore compléter leur apprentissage, je vous invite à traîner sur Youtube. Des dizaines de personnes montrent comment développer au mieux ses photos, chacun a ses petites techniques, c’est toujours bien de pouvoir comparer !
excellent blog ou l’on apprend beaucoup de chose pour un novice qui commence tout juste la photo avec un reflex FUJICA AX 3 pour faire du NB et je voudrai développer mes films moi même (économie ) pour les numériser ensuite merci
Merci pour ces explications, claires et pratiques!