Le daguerréotype fait suite à l’héliographie, mis au point par Nicéphore Niépce en 1827. Deux ans plus tard, en 1829, Niépce et Daguerre s’associent dans le but d’améliorer le procédé et de le commercialiser. Niépce apporte son invention et Daguerre met à disposition ses connaissances en chimie et ses relations professionnelles. Leur but est clair : créer et vendre un procédé photographique.
L’association Niépce-Daguerre
Daguerre depuis Paris et Niépce depuis Saint-Loup-de-Varennes mettent en place une correspondance pour partager leurs recherches. Malgré tout, gardant l’objectif commercial en tête, ils établissent des messages codés pour s’assurer que personne ne puisse voler leurs découvertes. Ainsi, 104 mots-clés sont encodés dans tous leurs échanges pour permettre de conserver le secret. On retrouve, par exemple, le chiffre 3 pour désigner l’alcool, le 20 pour l’iode ou encore le 22 pour parler de lavage.
Malgré un engagement assez peu perceptible de la part de Daguerre qui préférait créer des dioramas, les deux hommes continueront à partager leurs recherches. En 1832, Daguerre envoie un bilan de ses travaux à Niépce. Ils tentent un procédé améliorant l’héliographie précédemment utilisée. Appelé le Physautotype, ce procédé utilise des essences de lavande transformées en goudron, et du combustible de lampe à pétrole. Tous deux observent des résultat différents malgré un procédé et des produits strictement identiques. Malgré tout, il est bon de savoir que Niépce ne pourra jamais constater le moindre résultat des recherches de Daguerre. Personne ne saura jamais si ses recherches étaient réelles ou si son engagement était illusoire.
Malheureusement, Niépce meurt le soir du 5 juillet 1833 sans avoir achevé son invention. Comme le contrat le stipulait, c’est son fils, Isidore Niépce qui prendra sa place dans l’entreprise. Mais Isidore n’est pas son père et il est bien incapable d’en poursuivre les recherches.
Daguerre poursuit les recherches
Laissant Isidore s’embourber, Daguerre poursuis secrètement des recherches de son côté. En 1835, il accomplit de grands progrès. En exposant des supports couverts d’une fine pellicule d’argent à des vapeurs d’iode, il se crée de l’iodure d’argent, un produit nettement plus sensible à la lumière que le goudron utilisé jusqu’alors par Niépce.
Ce produit, exposé à la lumière, se décompose en iode et en cristaux d’argent. Le résultat n’est que peu perceptible dans un premier temps. Mais c’est par hasard qu’il découvre les propriétés révélatrices des vapeurs de mercure sur l’argent. Le mercure, réagit avec les cristaux d’argent pour former une couche blanchâtre, les parties exposées de l’image se révèlent alors. Il était maintenant capable d’obtenir une image en quelques dizaines de minutes contre plusieurs heures avec le procédé de Niépce.
En 1837, Daguerre parvient à fixer l’image créée par cette méthode pour rendre les photographies insensibles à la lumière. En utilisant une eau saturée en chlorure de sodium, il arrive à dissoudre les reste d’iodure d’argent non réagi. L’image est donc désormais insensible à la lumière. On notera qu’en 1840, suite aux recherches de Hippolyte Fizeau, le chlorure de sodium sera remplacé par une solution de chlorure d’or et de thiosulfate de sodium pour plus d’efficacité. Ce sera alors un fixage à l’or, par la suite renommé virage à l’or, puisque qu’utilisé pendant longtemps pour donner des teintes marron et rouge aux images.
Le Daguerréotype
Cette méthode de création d’images est présentée en janvier 1839 à l’académie des sciences de Paris. Il sera nommé le Daguerréotype par celui qui la présente : Louis Daguerre. Il se décrit alors comme l’inventeur de la photographie. Cette invention met en avant cette pratique nouvelle auprès du grand public et lance une course à la technologie. L’état français rachète son brevet durant l’été suivant contre une pension annuelle de 6 000 francs à Daguerre et 4 000 francs à Isidore, fils de Nicéphore Niépce. A noter que le salaire annuel ordinaire pour un ouvrier de l’époque se situe en dessous des 500 francs, c’est donc une rente plus que confortable.
Grâce à son invention laissée libre de droit par l’état, de nombreux chercheurs travailleront à améliorer son procédé. Le Daguerréotype est propagé dans le monde entier dès 1840. Il connaît alors un grand succès jusqu’au début des années 1850 où de nouveaux procédés viendront le détrôner. Il fait la renommée de Daguerre, mais aussi sa fortune puisque, en plus de la pension donnée par l’état, il se lance également dans la commercialisation du matériel photographique nécessaire au Daguerréotype.
Mais qui est l’inventeur de la photographie ?
Avant sa mort en 1851, Daguerre exigea qu’on fasse graver sur sa tombe la mention “Artiste-peintre, chimiste, inventeur de la photographie”. Et il sera pendant très longtemps désigné comme tel suite au succès de son invention. Et cela, malgré l’acharnement d’Isidore pour faire reconnaître Niépce comme l’inventeur légitime de la photographie.
Joseph Nicéphore Niepce est l’inventeur de la découverte qui consiste à reproduire spontanément (…) les images reçues dans la chambre noire. Et le procédé de M. Daguerre n’est qu’un admirable perfectionnement de cette découverte
Isidore Niépce
Historique de la découverte improprement nommée daguerréotype, 1841
Ainsi, aujourd’hui encore, le nom de Daguerre figure en lettre d’or, sur la Tour Eiffel aux côtés de grands savants français du XIXe siècle, contrairement à celui de Niepce. L’invention de la photographie ne lui sera définitivement remise qu’en 1867, suite à la publication, par l’archiviste Victor Fouques, de “La vérité sur l’invention de la photographie”. Malgré tout, le nom de Daguerre restera pendant très longtemps associé à l’invention de la photographie en laissant Niépce dans l’ombre. Encore aujourd’hui, la confusion règne et le nom de Daguerre y est souvent associé.
Le Daguerréotype reste néanmoins l’invention qui a permis de lancer la photographie et le métier de photographe dans le monde. Il restera pendant plus d’une décennie le procédé photographique le plus abouti. Cependant, il met en avant de nombreux freins à son utilisation. D’une part son coût, avec notamment l’utilisation de plaques de cuivre couvertes d’argent. De son temps de pose encore très important (de 10 à 40 minutes). Mais aussi de l’impossibilité de reproduire l’image créée. En effet, le Daguerréotype est un processus effectué en positif direct. Autrement dit, la plaque de cuivre insérée dans la caméra sera l’image finale. Il est donc impossible de la reproduire comme nous le ferions avec un négatif. Il faudra attendre l’invention du papier salé de l’autre côté de la manche, puis du cyanotype, pour permettre de reproduire des images à l’infini.
De nos jours, la méthode du Daguerréotype est très peu utilisée et est maintenant de l’ordre de curiosité historique. Très recherchées par les collectionneurs, ces images sont d’une grande qualité. Mais la toxicité des produits utilisés et leur coût de fabrication limitent grandement son utilisation. Encore plus dans une époque où l’écologie et l’économie est sur toutes les bouches.